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LA SOCIETE

Les différentes sociétés

  1. Quel premier lien réunit les hommes ?

  2. A quelles institutions renvoie Cicéron qui rendent effectif le lien politique ?

  3. De quoi se compose la société familiale ?

  4. Quelle nécessité fonde l'attachement à la famille ?

  5. Montrer que la chronologie met en avant une généalogie de l'humain.

Cicéron : les diverses sociétés humaines
 

Il y a plusieurs degrés parmi les sociétés humaines. Partant de celle qui s’étend sans limites, nous en trouvons une dont les membres sont plus proches les uns des autres parce qu’ils sont de même race, de même nationalité, parlent, ce qui est un lien très puissant, le même langage.

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Le fait d’appartenir à la même cité augmente encore leur intimité. Il y a beaucoup de choses qui sont communes entre les hommes d’une même cité : la place où se traitent les affaires publiques, les temples, les portiques, les rues, les lois, les règles du droit, les tribunaux, les élections et, outre les coutumes, les amitiés particulières et les nombreuses relations d’affaires. 

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Plus étroite encore est la société familiale : le petit cercle qu’elle forme est juste à l’opposé de la société sans bornes que forme le genre humain. Le désir de procréer en effet, qui est un trait commun à tous les vivants, fait du ménage de l’homme et de la femme la première société ; nos enfants sont ensuite pour nous les êtres les plus proches, nous avons même demeure, eux et nous, et tout nous est commun avec eux. C’est là le commencement de la cité, le lieu de naissance de la république. Viennent ensuite les frères, leurs enfants, les enfants de leurs enfants ; une demeure unique ne peut plus contenir tout ce monde, ils essaiment vers d’autres maisons qui sont à la première comme des colonies à la mère-patrie. De là des mariages, des parentés, un élargissement de la famille. Cette multiplication, cette prolifération sont l’origine des États.
Les liens du sang unissent les hommes par le bien qu’ils se veulent et l’affection qu’ils ont les uns pour les autres. Car c’est un grand point de posséder des monuments rappelant les noms des ancêtres, d’offrir les mêmes sacrifices aux dieux, d’avoir des sépultures communes. Mais, de toutes les sociétés, nulle ne l’emporte en solidité, en excellence sur celle des hommes de bien se ressemblant moralement et liés d’amitié. C’est vraiment, il nous arrive souvent de le dire, une chose belle à voir même en un étranger, qu’une âme capable d’amitié ; un tel spectacle nous émeut et nous incline à devenir les amis de ceux qui donnent cet exemple.
Et s’il est vrai que toute vertu a de l’attrait, nous porte à aimer ceux en qui elle paraît exister, encore la justice et la libéralité ont-elles ce pouvoir au plus haut degré. Or rien n’est plus aimable et n’attache plus étroitement des êtres distincts que la ressemblance morale. Ils ont mêmes soucis, même volonté, chacun d’eux aime son ami plus que soi-même et ainsi arrive-t-il que, selon le vœu de Pythagore, il y ait fusion de plusieurs en un seul. C’est une grande chose que cette étroite communion faite d’un échange de bons offices : aussi longtemps qu’ils sont à la fois mutuels et agréables, ils créent des liens étroits entre ceux qui en sont les auteurs et les bénéficiaires.
Si toutefois l’on passe méthodiquement en revue toutes les sortes de lien social, celui qui attache à la république chacun de nous, paraîtra le plus fort et aussi le plus aimé. Nos parents, nos enfants, nos proches, nos amis nous sont chers, mais notre patrie embrasse dans son unité toutes nos affections à tous. Quel homme de bien hésiterait à chercher la mort, si cela devait être utile à la patrie ? Il n’en faut que plus détester la perversité monstrueuse de ces hommes qui l’ont criminellement déchirée, n’ont eu, n’ont encore d’autre souci que de la détruire de fond en comble.
Si cependant l’on veut dresser une échelle des obligations sociales, on devra mettre au premier rang celles que nous avons envers notre patrie et ceux de qui nous sommes nés : c’est à eux que nous devons le plus ; ensuite viendront nos enfants et toute notre maisonnée qui n’attend que de nous aide et protection, puis ceux de nos parents plus éloignés avec lesquels nous nous entendons bien : souvent nous partageons le même destin. Donc et avant tout, ceux que je viens de nommer doivent pouvoir compter sur nous pour les aider à vivre, mais nous partagerons la vie de nos amis, c’est avec eux principalement que nous échangerons, outre le pain et le sel, des conseils, des propos, des exhortations, des consolations, parfois aussi des reproches. Il n’est rien de plus doux qu’une amitié qui se fonde sur des ressemblances morales.

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